Il ne faut pas confondre échanges et monnaie, l’humanité n’a pas toujours eu besoin de monnaie :
Les humains sont des êtres sociaux qui ont très rapidement compris l’intérêt de vivre en groupe communautaire : le groupe apporte sécurité par rapport aux dangers extérieurs et permet la répartition des tâches grâce à des échanges coopératifs.
Ces échanges sont de tous ordres : matériel, services, échanges de savoir et de savoir faire et surtout échanges affectifs. Dans tout échange, il y a une part affective plus ou moins grande : très importante dans les échanges amoureux jusqu’à devenir presque négligeable dans certains échanges matériels.
Mais ce sont les échanges affectifs qui priment sur les autres. Une petite communauté peut vivre sans monnaie : il y a un sentiment naturel de dette lorsqu’on a reçu quelque chose du groupe qui donne envie de donner en retour. Les échanges tendent spontanément à être équilibrés : don pour don, agression pour agression même si certains, au prix d’une discipline morale, arrivent à donner sans besoin de retour et ne pas répondre agressivement à une agression. Entre amis, nous pouvons faire des échanges sans avoir besoin de monnaie. C’est lorsqu’on veut équilibrer des échanges éloignés dans le temps et l’espace que l’on a eu envie d’introduire une façon d’en mesurer la valeur pour s’assurer de la réciprocité. Il y en a eu de toutes sortes : coquillages, animal ou aliment que chacun possédait, écriture, pièces, billets,… mais la définition reste la même :
La monnaie n’est qu’un moyen de mesurer la valeur des échanges de façon à conserver cette valeur dans le temps et l’espace pour que celui qui a donné à quelqu’un puisse avoir le droit de recevoir de lui (troc)ou de n’importe quelle personne du groupe (échange communautaire) pour la même valeur. Celui qui a commencé par recevoir doit rendre pour la même valeur (dette).
Donc à peu près n’importe quoi qui sert à mesurer des valeurs peut servir de monnaie. La monnaie mesure la valeur des richesses réelles échangées (biens, services, transmission de savoir ou de savoir faire, tout ce qui représente un travail) mais peut aussi avoir de la valeur par elle même : lorsqu’on parle de la valeur d’une monnaie, il faut savoir de quoi on parle : la valeur propre (la valeur qu’elle a quand on ne s’en sert pas comme monnaie), la valeur qu’elle a ou qu’elle symbolise au moment où on la crée ou on la reçoit (celle de la richesse qu’on vient de vendre) et la valeur que les autres lui accordent lorsqu’on veut acheter (qui devrait être la même mais peut être différente s’il y a inflation, voire nulle si les autres n’ont pas confiance ou, au contraire bien plus importante que la valeur de départ dans le cas par exemple d’une fausse monnaie). Une monnaie n’est fiable qu’à condition de remplir toutes les conditions d’une mesure fiable : être étalonnée (tout le monde a la même unité et tout le monde peut en posséder une copie), ne pas être créée abusivement (fausse monnaie), avoir des valeurs de départ (lorsqu’on la crée ou la reçoit) et d’arrivée (lors de l’utilisation ) identiques.
Nous entendons par fausse monnaie une monnaie dont la valeur de création est très inférieure à la valeur du pouvoir d‘achat. Attention aux mots qui empêchent de penser : les économistes appellent monnaie fiduciaire (de confiance) la monnaie de banque centrale et fausse monnaie la monnaie qui imite la monnaie de banque centrale ; de telles définitions empêchent de penser qu’il puisse y avoir de la fausse monnaie de banque centrale, or nous verrons que c’est pourtant le cas. Cette fausse monnaie là est indétectable pour les utilisateurs tout en rapportant énormément aux faussaires et ne s’appréhende que si on connaît les modalités de création et le fonctionnement global du système monétaire.
Il n’y a que 2 sortes de monnaie fiable possibles :
_La monnaie qui a une valeur propre égale à la richesse vendue, qui permet de faire un double troc : richesse vendue contre monnaie puis monnaie contre richesse achetée. Cette monnaie a existé dans les communautés paysannes (un animal ou un aliment que tout le monde possédait pouvait servir de monnaie d’échange), mais aussi chez les marchands internationaux qui utilisaient l’or comme monnaie internationale d’échange, puis chez les souverains qui ont utilisé l’or ou divers métaux précieux comme monnaie nationale. On pourrait l’appeler monnaie troc qui peut se présenter sous sa forme matérielle (pièces d’or) ou symbolique (titre de propriété). L’Or a la particularité de ne pas être possédé par tout le monde et met automatiquement ceux qui n’ont pas d’or (le peuple) sous la domination de ceux qui ont de l’or: nous pourrions l’appeler monnaie souveraine.
_La monnaie dont la valeur propre est sans importance mais qui symbolise précisément la valeur de la richesse qui a permis sa création ou son obtention (une écriture, un coquillage, un billet, …). Nous pourrions l’appeler monnaie mesure (notons qu’elle a existé bien avant la monnaie or car on la retrouve sous forme de signes gravés sur des tablettes d’argile). Elle aussi peut se présenter sous une forme matérialisée (pièces et billets) ou scripturale (écrite ou numérisée).
Pour chacune de ces monnaies, c’est le mode de création qui va déterminer si elle sera souveraine ou communautaire: si elle est crée par un seul individu, ou groupe d’individus, elle est souveraine car ce sont eux qui vont déterminer le droit des autres à faire des échanges: avant de pouvoir échanger entre eux, ces autres doivent d’abord travailler pour ceux qui produisent la monnaie afin d’en obtenir.Elle est communautaire si c’est ceux qui échangent qui peuvent la créer.
Au total, il ne peut donc y avoir que 4 sortes de monnaies fiables possibles conformes à notre définition de la monnaie :
_La monnaie troc souveraine comme la monnaie or.
_La monnaie troc communautaire : poule, mesure de céréales.
_La monnaie mesure souveraine, comme celle de l’Egypte ancienne et même des sumériens où un employé de l’état écrivait la mesure de ce que chaque travailleur faisait.
_la monnaie mesure communautaire où ce sont ceux qui échangent qui déterminent la valeur de l’échange et en écrivent la mesure.
A noter que beaucoup d’autres choses permettent de mesurer la valeur des échanges sans posséder les qualités nécessaires à une mesure fiable, ce qui génère des systèmes non viables à terme.
Nous vivons depuis plus de 5000 ans sur un système hérité de la monnaie Or mais qui n’en possède plus les conditions de fiabilité alors qu’il laisse les créateurs de monnaie en position de souverains.
Voir l’histoire de la monnaie souveraine de l’antiquité à nos jours