Archives mensuelles : septembre 2015

Programme pour un monde meilleur

Notre société n’est pas si mauvaise, dirons certains, qu’il faille en changer : il y a pire, regardez les autres pays, plus pauvres, ou en guerre, ou sous la coupe de tyrans. Certes, il y a pire : nous croulons sous une abondance de biens matériels et il y a encore un semblant de démocratie. Mais il y a aussi pas mal de défauts que nous allons répertorier, qui gâchent la vie de pas mal d’entre nous, qu’il serait possible de supprimer si nous sommes assez nombreux à le vouloir et qui ne feront que s’aggraver si nous ne faisons rien.

 

L’austérité liée à la dette

       On nous dit que l’état est obligé de réduire tous ses programmes sociaux pour rembourser une énorme dette, ceci en culpabilisant les plus démunis qui grèvent par exemple le budget de la sécurité sociale.

Les vraies causes de la dette

Il y en a  essentiellement quatre :

-Les intérêts exorbitants des emprunts de l’état : ils sont dus au fait que les états ont délégué à des banquiers privés le pouvoir de créer de l’argent. Chaque fois qu’il y a besoin de créer de la monnaie, ne serait-ce que pour équilibrer la masse monétaire en circulation lorsque le PIB augmente, ils doivent verser des intérêts réels à des banquiers qui n’ont fait que créer une monnaie artificielle sur une ligne d’ordinateur alors que si c’était l’état qui le faisait, il n’y aurait pas d’intérêts à verser. La totalité de nos impôts sur le revenu servent à payer les intérêts de la dette alors que si depuis 1970 l’état n’avait pas recouru à des emprunts sur les marchés financiers, il n’y aurait plus aucune dette. Ceux qui s’intéressent à cette usurpation de la création monétaire peuvent consulter l’article « le coup d’état des grandes banques » ou l’excellent site www.comprendrelargent.net

-La reprise par l’état des énormes sommes données aux banques sans contrepartie pour les renflouer après la crise de 2008 due à leur excès de spéculation.

-Le déséquilibre entre recettes et dépenses : on nous dit que l’état dépense trop en  oubliant de dire qu’il pourrait gagner plus s’il n’avait pas fait tant de cadeaux aux riches et aux grandes entreprises : l’ensemble des baisses d’impôts accordés aux grandes entreprises et aux plus riches depuis 10 ans nous coûte chaque année 100 milliards. La fraude fiscale des grandes entreprises et des plus riches, contre laquelle on ne lutte pas beaucoup, est évaluée à 50 milliards par an, soit l’équivalent du déficit de l’état. La fraude sociale, quant à elle, que l’on ne manque pas de stigmatiser et d’incriminer, n’est évaluée qu’à 300 millions d’euros (sur un budget de 500milliards).

-le déséquilibre du commerce extérieur : on nous dit que nos entreprises ne sont pas assez compétitives, ce qui justifie les cadeaux fiscaux et l’aggravation des conditions de travail, mais c’est parce qu’on les met en compétition avec des pays où les travailleurs sont beaucoup moins payés.

Les solutions

Redonner à un état démocratique  le pouvoir de créer sa monnaie et l’écrire dans sa constitution. C’était écrit dans la constitution des USA mais 3 grands banquiers ont réussi un véritable coup d’état en 1913 en faisant voter la « loi sur la réserve fédérale » qui, comme son nom ne l’indique pas, n’est ni une réserve ni fédérale. Elle donne,  grâce à un savant montage, tout pouvoir à ces 3 banquiers de contrôler la masse monétaire du pays et les taux d’intérêt. Ils peuvent ainsi à leur guise provoquer inflation ou récession. (cf texte sur « le coup d’état des grandes banques »). Ce système a été reproduit dans la construction européenne où la banque centrale n’a pas le droit de prêter aux états. Elle crée de l’argent qu’elle prête aux banques privées qui prêtent à leur tour aux états, générant ainsi des taux d’intérêt qui n’ont pas lieu d’être. Une grande partie de la dette est donc illégitime. Certains parlent de la renégocier sans changer nos institutions mais cela dépend du bon vouloir des banques et il est peu probable qu’elles acceptent à moins d’y être forcées. Seul un état qui inscrirait la création monétaire dans sa constitution rendrait ces intérêts illégaux.

-Faire rembourser les banques, les très grandes entreprises, et les très riches des cadeaux qui leur ont été faits ou du moins supprimer ces cadeaux inutiles.

_Les grandes entreprises sont taxées à 25% sur leurs bénéfices en Europe alors qu’elles le sont à 40% aux USA. Les multinationales arrivent même à ne pas payer d’impôts du tout grâce à de savants montages dans les paradis fiscaux mais on pourrait, si on le voulait, trouver des moyens de les imposer quand même. Les très riches étaient imposés à 70% sous Roosevelt et ne s’en portaient pas plus mal ; ils le sont beaucoup moins maintenant, d’autant moins qu’ils ont à leur disposition des « niches » fiscales » qui leur permettent de minorer encore les prélèvements.

-Faire cesser cette compétitivité à outrance, cette concurrence faussée car elle met en compétition des pays avec des niveaux de vie très différents. Il faut rétablir des droits de douane pour protéger nos industries et permettre même la réindustrialisation du pays. Les USA l’ont fait pour protéger leurs industries quand elles étaient faibles et ont prôné le « libre échange » quand elles ont été assez fortes pour écraser les autres. . Après la guerre de 1940-1945, et pour éviter de nouveaux désordres économiques reconnus comme grands responsables des guerres, 53 pays capitalistes s’étaient  réunis pour élaborer une chartre régissant le commerce international : la Charte de la Havane fut élaborée du 21 novembre 1947 au 24 Mars 1948. Le but était de créer une Organisation Internationale du Commerce (OIC), dans le cadre de l’ONU, en complément du FMI et de la Banque mondiale, afin de reconstruire un ordre économique international cohérent, l’ONU reconnaissant les fondements économiques de la paix énoncés dans l’article 55 de la Charte des Nations Unies. Cette chartre prévoyait un équilibre des balances commerciales des différents pays, des normes de travail équitables avec interdiction du dumping, le contrôle du mouvement des capitaux et la possible intervention de l’état, la coopération entre les états plutôt que la concurrence effrénée. Cette OIC n’a jamais vu le jour car le Congrès américain qui venait de changer de majorité, s’est opposé à sa ratification. Il estimait que les Etats unis devaient s’assurer une totale liberté pour écouler leur surplus de marchandises aux pays qui en étaient dépourvus au lendemain de la guerre. C’est ainsi que nous avons eu l’OMC, indépendante de l’ONU, à la place de l’OIC. L’OMC et le FMI, sous domination américaine, ont favorisé des pactes bilatéraux toujours à leur avantage. C’est le cas du « partenariat transatlantique » que l’on veut nous imposer qui prévoit au contraire la domination des grandes entreprises multinationales sur les états. La construction européenne du traité de Maastricht entre dans ce même cadre néolibéral mettant les états en concurrence au lieu d’être en coopération, organisant le dumping social, donnant le pouvoir aux grandes entreprises sur les états à travers des instances non démocratiques.

Pour faire cesser cette hyper-compétitivité, il faut rétablir des droits de douane de telle sorte que le prix d’une marchandise importée soit le même que celui de la même marchandise fabriquée en France : ainsi, la concurrence ne porterait que sur la qualité du produit et ces droits de douane pourraient être reversés en aides aux travailleurs du pays concerné.Il ne faut pas croire que rétablir des droits de douane nous isolerait du monde: ces droits n’ont jamais empêché le commerce mais permettent de le réguler et de protéger nos industries.

 

Le Chômage 

     Il y a actuellement plus de 6 millions de demandeurs d’emploi inscrits à pôle emploi (tous ne sont pas inscrits et seulement 6 chômeurs sur 10 sont indemnisés), 8,5 millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté (987€ par mois) dont 3millions d’enfants.

Les causes

La désindustrialisation du pays par les délocalisations plus rentables pour les multinationales.

-Le gain de productivité des travailleurs : en trente ans, l’économie française produit 76 % de plus avec 10 % de travail en moins. Du fait des gains de productivité, l’économie a besoin de 10 % de travail en moins mais, dans le même temps, le nombre de personnes disponibles a augmenté de 23 % ! Un écart de 33 % s’est donc creusé entre l’offre et la demande de travail.

-Le fait qu’il y ait un chômage important favorise les entreprises qui peuvent augmenter la pression sur leurs employés.

Les solutions

Réindustrialiser le pays  grâce à des droits de douane protecteurs.

-Diminuer le temps de travail qui pourrait être ramené à 4 jours, 28 ou 30 heures (actuellement, la moyenne du temps de travail est de 33,7h aux USA et de 30,05h en Allemagne). Certains ont un mauvais souvenir du passage aux 35h parce que celui-ci s’est fait dans de mauvaises conditions : les entreprises soumises à des impératifs de compétitivité ont triché et ont demandé aux salariés de faire en 35h ce qu’ils faisaient en 40h sans embaucher. Il en serait autrement si elles n’étaient pas soumises à une concurrence si sévère et étaient sûres de pouvoir vendre plus cher grâce à la protection douanière.

_Le » salaire de base », revenu distribué indistinctement à tous, financé à la fois par l’ensemble des aides aux plus démunis (RSA, allocations diverses), les impôts sur les plus riches et la création monétaire. Il s’ajoute aux revenus du travail quand il y en a et permet de continuer à vivre sans quémander quand il n’y en a pas.

 

L’immigration 

Il est évident que nous ne pouvons pas accueillir tous ceux qui fuient leur pays à cause d’une mauvaise organisation économique. Mais il y a déjà beaucoup de barrages mis à leur installation et leur coût financier est dérisoire par rapport à tous les manques à gagner. Le problème est en amont, il faut aider les pays d’où ils viennent à mieux organiser leur économie.

 

 

L’insécurité 

Les récents attentats ont renforcé le sentiment d’insécurité, le désir de s’en remettre à quelqu’un de puissant qui nous protège, et d’éradiquer le mal vu sous la forme d’un intégrisme religieux. Mais méfions-nous de ces pulsions primaires et du discours des pompiers pyromanes : le problème n’est pas un problème religieux mais un problème économique et politique et ceux qui prétendent nous protéger sont en grande partie responsables : les frères Kouachi ont été élevés dans un orphelinat en France et avaient alors des compétences et un désir d’intégration mais que leur a-t-on proposé à leur majorité ? on les a mis à la rue car à 18 ans, ils ne relevaient plus de la protection de l’enfance, sans accompagnement pour les aider à trouver un travail (et notre système faisant qu’il n’y a plus assez de travail pour tout le monde, les plus fragiles restent sur la touche), dans des ghettos de désœuvrés à la recherche d’une identité sociale. Que leur propose-t-on à part le spectacle de l’exclusion et de la corruption généralisée ? Ce sont ces conditions qui leur permettent d’adhérer à des discours qui leur fournissent un idéal adapté à la violence qu’ils ressentent. Et s’ils commencent à dévier, la seule réponse est la prison qui, loin de les rééduquer, ne fait que renforcer leur violence.

La solution n’est pas dans la répression car on ne peut mettre un gendarme derrière chaque citoyen et ceux qui sont déterminés passeront toujours à travers les mailles, mais dans une meilleure éducation et intégration de notre jeunesse.

Ce sentiment d’insécurité était distillé par les médias bien avant les attentats car des individus en insécurité se terrent chez eux, ne font plus confiance à leur voisin et ne s’associent plus dans des mouvements sociaux. Et le désir de répression qu’il inspire permet de faire voter des lois qui, sous prétexte de lutter contre les « terroristes » sont liberticides pour l’ensemble de la population car, par un glissement de sens, sont passibles d’être accusés de « terroristes » tous ceux qui s’opposent aux privations de liberté imposées par le gouvernement. On a vu aux USA nombre de lois liberticides votées après le 11 septembre qui sont toujours en vigueur.

 

L’éducation 

Malgré le dévouement de la plupart des enseignants, notre système d’ « éducation nationale » ne mérite guère son nom, il vaudrait mieux parler d’ « instruction nationale ». Une véritable éducation part de la spécificité de chaque enfant, de ses préoccupations  personnelles, pour l’amener à se construire et à développer ses compétences. Tout notre système est à repenser avec l’aide des intéressés en fonction de ces principes.

 

Ecologie et respect de l’environnement 

Le non-respect de l’environnement est une conséquence du système capitaliste qui oblige les entreprises à devenir toujours plus grosses et produire toujours plus pour résister à la concurrence, s’enrichir ou simplement survivre, au mépris des hommes et de l’environnement : les très gros chaluts  qui détruisent les fonds marins et des milliers de tonnes de poissons inutiles rejetés morts en mer, Monsanto qui affame les populations des pays du sud en leur faisant produire des plantes brevetées et stériles résistantes aux pesticides qu’ils vendent aussi, ….Quand on ne respecte pas les hommes, on ne respecte pas la nature ; quand un homme n’est pas respecté, il ne respecte pas non plus les formes de vie plus faibles. L’idéologie capitaliste considère qu’il n’y a pas de place pour tous, que les plus forts peuvent accéder à une richesse illimitée en ne laissant que des miettes aux plus faibles : une telle idéologie est par nature destructrice et conduit au pillage des ressources. Vouloir être écologique dans de telles conditions est voué à l’échec.
L’idéologie démocratique au contraire, qui préconise le respect d’autrui, le partage et la collaboration plutôt que la compétition, débouche naturellement sur un respect de l’environnement

 

L’accroissement des inégalités 

L’accroissement des inégalités est inhérent au système capitaliste : les riches ont 3 moyens accroître leur richesse indéfiniment sans rien produire : en faisant travailler les autres pour eux ( les propriétaires des entreprises ou les actionnaires), en prêtant leur argent avec intérêt, ou en spéculant (la bourse n’est qu’un jeu spéculatif au même titre que le tiercé à la différence qu’il n’est pas imposé par l’état et que les chevaux qu’on fait courir sont les salariés  des entreprises). Ce sont eux qui décident du salaire des salariés et, profitant de leur pouvoir, ils ont réussi en 10 ans à accroître leur part du PIB de 10% au détriment des salariés.

Entre salariés aussi, les différences peuvent être énormes  : le PDG de Renault par exemple gagne 100 fois le SMIG .Et les salariés les mieux payés cumulent ces salaires avec des primes et des actions propriétaires.

Les solutions

-Au plus fort du capitalisme triomphant aux USA, des patrons pourtant très puissants comme JP Morgan considéraient que l’écart des salaires entre un patron et un ouvrier ne devait pas dépasser la proportion de 1 à 20. Aujourd’hui, il n’y a plus de retenue et on en est de 1 à 100 et plus. Il faut que l’état instaure un revenu maximum au-delà duquel l’imposition sera de 100% en faisant entrer dans le revenu les revenus spéculatifs. Cela aurait le double avantage de réduire les inégalités (en permettant aussi de revaloriser le SMIG) et de faire en sorte que les puissants n’aient plus pour seule obsession d’accumuler indéfiniment de l’argent au mépris de leurs concitoyens et de l’environnement.

-Les actionnaires non-salariés d’une entreprise pourraient prêter leur argent et  toucher des intérêts sur les bénéfices mais n’auraient aucun pouvoir de contrôle sur la marche de l’entreprise (on a vu des fonds de pension obliger l’entreprise à s’endetter lourdement pour toucher encore plus de dividendes et limoger le PDG qui n’était pas d’accord).

-Les patrons ne seraient pas les seuls à décider du salaire : une commission nationale pourrait décider du salaire moyen de chaque profession, celui-ci pouvant être modulé ensuite en fonction de la qualité du travail.

_Les revenus boursiers seraient taxés comme les autres revenus. On pourrait même supprimer la bourse, comme le propose l’économiste Frédéric Lordon, car si l’état peut facilement prêter aux entreprises, celle-ci perd de son intérêt et ne sert plus qu’à la spéculation.

-L’accumulation de bénéfices énormes par de grosses entreprises privées pourrait être automatiquement limité sans gros moyens de contrôle en instaurant dans tous les domaines une concurrence saine entre les entreprises privées et des entreprises d’état : les entreprises d’état fonctionnant de manière démocratique, avec une comptabilité publique transparente et des bénéfices juste suffisants pour assurer la bonne marche de l’entreprise. Si le privé peut faire de meilleure qualité ou à moindre coût, il peut gagner plus mais pas dans des proportions énormes.

 

 

Une justice pas égale pour tous 

Il est facile de constater que la justice est généralement beaucoup plus sévère pour les pauvres que pour les riches ou les puissants.

Les causes

Le code pénal ne propose guère d’autres sanctions que des amendes ou de la prison : les riches souffrent beaucoup moins des amendes.

-Ils peuvent se payer de très bons avocats capables de profiter du moindre vice de forme.

-Le code pénal est beaucoup plus indulgent pour les délits financiers qui peuvent pourtant avoir des conséquences graves pour la vie de nombreux citoyens.

-C’est le procureur, dépendant de l’exécutif, qui décide si une affaire doit être portée devant la justice ou pas : il est donc facile pour l’exécutif de bloquer les affaires qui le touchent.

-C’est l’exécutif qui décide de la carrière des juges : ceux qui veulent rester intègres dans les affaires politiques doivent renoncer à faire carrière.

-Pour échapper encore mieux à la justice ordinaire, les politiques ont créé la « haute cour de justice » composée de leurs pairs et donc plus enclins à la clémence.

Les solutions

-Rendre la justice indépendante de l’état : elle pourrait dépendre d’un « conseil des sages » élu au suffrage universel ou tiré au sort, totalement indépendant, même pour son budget, de l’exécutif.

-Ce conseil des sages pourrait avantageusement remplacer le conseil constitutionnel, garant de la constitution, et le sénat pour donner son accord à toute proposition de loi.

-Il aurait en charge la police qui ne dépendrait donc que de la justice. L’exécutif n’aurait à sa disposition que la gendarmerie.

-Reprendre tout le code civil pour que les lois soient vraiment les mêmes pour tous et que les sanctions aient valeur de réparation en vue d’une réinsertion. La prison ne serait réservée qu’aux personnes dangereuses et serait conçue autrement, en plongeant les prisonniers dans un milieu éducatif très contenant où règne la loi et le respect au lieu de les exposer à « la loi du milieu » qui ne fait que les endurcir.

-La « haute cour de justice »serait supprimée.

 

L’illusion démocratique 

Beaucoup d’entre nous croient encore être en démocratie parce qu’ils ont la possibilité de voter tous les 5 ans pour un président et sa « troupe » de députés  élue pour son appartenance au même parti et qui doit le soutenir quoiqu’il fasse. Si l’on considère que la démocratie c’est la possibilité pour chaque citoyen de participer aux décisions qui le concernent et de pouvoir choisir et révoquer ceux qui le gouvernent, il faut reconnaître que nous en sommes loin :

-Nous ne faisons qu’élire un chef de gouvernement très éloigné de notre quotidien : ceux qui ont le plus de pouvoir sur nous, les patrons, les fonctionnaires, ne sont pas élus ni révocables par nous.

– Ce président ne représente en fait qu’une minorité de français : en 2012  François Hollande a obtenu au premier tour 28.63% des 77.96% votants  exprimés soit 22.31% des Français. Au second tour ceux qui se sont ralliés à lui l’ont fait plutôt pour voter contre son prédécesseur que pour lui et malgré cela, il ne représente que  51.63% des 75.69% votants  exprimés soit 39% des Français. Il en était de même pour Nicolas Sarkozy.

-Ceux qui ont voté pour son programme ont été floués car, même s’il ne respecte pas ses promesses, il est irrévocable pendant 5 ans. Et pour le remplacer, on va nous proposer le précédent.

-Notre choix est canalisé par les médias sur 2 grands partis dits « de droite » et « de gauche » mais qui ont exactement le même programme économique donc le même programme politique à quelques détails près.

-Ces hommes (et femmes) politiques élu(e)s ne possèdent plus de véritable pouvoir : ils l’ont donné aux banquiers et aux grands industriels avec qui ils possèdent des liens incestueux : ce sont eux qui assurent leur fortune et payent leur campagne électorale très coûteuse et, en échange, ils mènent leur politique, à savoir la braderie de l’état au privé et la destruction de l’état social. Le vrai terme pour désigner notre organisation sociale n’est pas « démocratie » mais « oligarchie », c’est-à-dire gérée par un petit groupe dominant. Plus exactement peut être par « ploutocratie » car cette classe dominante n’est pas constituée des meilleurs mais des plus riches.

-Cette petite classe dominante possède tous les pouvoirs :

L’argent : « donnez-moi le contrôle de la monnaie », avait dit Rothschild, « et je me moque de qui fait les lois »

La propriété des grandes entreprises avec pouvoir sur les salariés.

Le pouvoir idéologique par sa possession des médias qui répandent l’idéologie néo-libérale comme étant la seule possible : on pouvait se demander pourquoi un entrepreneur de travaux public achetait une chaîne de télévision alors qu’il n’en avait aucune compétence; la réponse a été donnée par le directeur qu’il a choisi et qui a reconnu être là pour « vendre des temps de cerveau disponible » aux publicitaires, c’est-à-dire aux grands industriels.

Le pouvoir politique : les hommes et femmes politiques de « droite » comme de « gauche » sortent tous des mêmes écoles (qui recrutent déjà de préférence dans cette classe), sont loin des préoccupations populaires, sont formatés à l’idéologie néo-libérale et ont des intérêts convergents.

-Et l’heure est grave si nous ne faisons rien car l’oligarchie qui contrôle les USA se mondialise et n’hésite pas à assassiner des milliers d’individus, y compris dans sa propre population, pour assouvir sa soif d’argent et de pouvoir.

(Voir la fiche « histoire populaire de l’Amérique », résumé du livre de Howard Zinn et celle du « 11septembre », résumé du livre de Ray Griffin)

Ce n’est pas  une « théorie  » du complot,( prenez la peine de vous informer et de vérifier vos informations en dehors de la propagande officielle),  c’est un véritable complot des puissances d’argent contre les peuples, qui a pris son essor à partir du moment où des banquiers privés ont réalisé un véritable coup d’état en prenant le contrôle de la monnaie US grâce à la «  loi sur la réserve fédérale »,emprisonnant ainsi les USA puis les autres états dans une dette exponentielle. Et leur appétit de pouvoir et d’argent est tel qu’ils n’hésitent pas à détruire tous ceux qui s’y opposent : les 3 présidents US qui ont essayé de reprendre le contrôle de la monnaie sont morts assassinés, et, pour le président Kennedy au moins, on a maintenant la preuve qu’il s’agissait d’un complot dans lequel étaient impliqués le FBI et Rockefeller (cf fiche « Kennedy »).Ils se nourrissent des guerres qu’ils provoquent ou attisent, méprisent les peuples et l’environnement, cherchent à imposer une gouvernance mondiale non démocratique et conduisent si on les laisse faire l’humanité à sa perte.

 

Comment établir un état démocratique ? 

C’est la question la plus difficile car une véritable démocratie au sens où nous l’avons définie n’a pu exister que dans de petits groupes, jamais au niveau d’un état important.

La démocratie n’est pas l’organisation la plus spontanée : le plus spontané est que les plus puissants dominent les autres et imposent leur loi et il faut savoir que tout individu, ou groupe d’individus, doté d’un pouvoir a tendance à utiliser ce pouvoir pour aller dans le sens de ses propres intérêts et pour éliminer ceux qui s’y opposent .

-Il ne faut jamais donner un trop grand pouvoir à un seul individu ou groupe d’individu. L’histoire fourmille d’exemples de révolutionnaires portés au pouvoir avec des idées démocratiques qui sont devenus ensuite de véritables tyrans. La constitution de la 5ieme république donne beaucoup trop de pouvoirs au seul président. Et si le président a du pouvoir sur le peuple, il est soumis au pouvoir des grands banquiers et des grands industriels qui sont devenus plus puissants que l’état : personne ou groupe de personnes ne doit pouvoir devenir plus puissant que l’état démocratique comme le permet ce système capitaliste. Le système capitaliste qui permet la possession de son outil de travail n’est pas mauvais en soi : il le devient lorsqu’il n’est pas limité et encadré par un système démocratique.

-Il faut renoncer à l’idéologie néo libérale qui prétend qu’en abolissant les règlementations, un équilibre égalitaire finira par s’établir : c’est manifestement faux ! Quand on supprime les règles, c’est la loi du plus fort qui s’impose. La démocratie a besoin de règles  qui protègent les plus faibles.

 

Des solutions possibles

Il faudrait donc que tout individu exerçant un pouvoir fasse la preuve de ses compétences et, pour respecter la démocratie, soit librement choisi et révocable par ceux sur qui ce pouvoir s’exerce

Cela ne passe pas forcément par l’élection : par exemple, pendant la période de plein emploi des années 60, il pouvait y avoir des petits patrons non élus dans un contexte démocratique car un ouvrier pouvait choisir son patron et en changer quand il voulait.

-Mais cela peut aussi passer par l’élection quand on connait celui que l’on élit et que l’on peut être associé à ce qu’il fait : c’est le cas par exemple des maires des petites communes. Les élections ne sont plus démocratiques lorsque celui pour qui on vote est trop lointain, connu seulement par une étiquette de parti et une image de façade, et que l’on est ni associé ni même témoin de ce qu’il fait vraiment .Il faut donc beaucoup d’élections sur de nombreux niveaux pour que l’élu soit toujours contrôlable par ceux qui l’ont élu : un ministre par exemple n’a pas à être choisi par le chef du gouvernement simplement parce qu’il est de son parti (en pouvant prendre n’importe quel ministère comme s’il pouvait avoir toutes les compétences) mais par une pyramide de ses administrés.

-Certains proposent le tirage au sort de ceux qui ont une charge publique, à durée limitée et non renouvelable comme cela se pratiquait dans la démocratie athénienne. Cela a l’avantage de concrétiser que la politique est l’affaire de tous, pas seulement de professionnels, limite les possibilités de corruption et abolit la dépendance aux bailleurs de fonds pour les campagnes électorales. Le risque est de tirer un incompétent (mais on peut en élire un aussi) : le tirage  pourrait n’avoir lieu que parmi ceux qui ont pu prouver au préalable une compétence.Ce qui sous-entend aussi que la politique n’est pas un métier: il faut un premier métier dans lequel on a montré ses capacités avant de pouvoir accéder éventuellement à une charge politique.

-Dans une démocratie, ce n’est pas le gouvernement qui impose ses lois : il n’est là que pour exécuter les lois votées par le parlement.

-Le parlement lui-même doit être composé d’élus au sommet d’une pyramide d’élus ou d’un échantillon de la population tiré au sort. Mais avec les moyens modernes de communication, notamment internet, il me semble qu’il serait possible que chaque loi soit votée par l’ensemble des citoyens concernés après une discussion nationale.

 

Concrètement

Tout ceci est une ébauche de ce que pourrait être notre travail collectif: mettre au point un système politico-économique cohérent qui permette une véritable démocratie. Contrairement à ce que l’on veut nous faire croire, des solutions sont possibles dès qu’on accepte de sortir du système » néo-libéral ». Certains diront que c’est  complètement utopiste car trop éloigné de la réalité actuelle. Et pourtant : l’utopie n’est qu’un projet non encore réalisé et nul ne peut dire qu’il est irréalisable sans en fournir la preuve. L’utopie certainement irréalisable en ce moment, c’est la croyance en une croissance infinie dans un monde fini : l’idéologie néo libérale veut nous imposer cette croyance en étouffant toute pensée contradictoire car c’est une nécessité pour ceux qui la pilotent, c’est-à-dire quelques gros capitalistes, pour continuer à s’enrichir : comme ils produisent au bout d’un moment trop pour la consommation intérieure (restreinte aussi parce que les ouvriers ne sont pas assez payés), ils ont besoin de trouver des débouchés extérieurs, soit par des guerres (c’est le but essentiel des guerres faites par les USA), soit par des « traités » bilatéraux léonins qui imposent aux états plus faibles d’ouvrir leur frontière et de détruire leur état social pour être livrés à leurs multinationales. L’utopie, c’est aussi de croire qu’on peut réformer le système sans sortir de l’euro et de la construction européenne actuelle, sans reprendre le contrôle de la monnaie et des frontières : l’expérience vouée à l’échec de Syriza en Grèce nous en fournira la preuve .On nous promet les pires catastrophes si nous sortons de l’euro : fuite des capitaux, inflation, dette accrue. C’est vrai si on ne remet pas en question le fonctionnement des banques et de la création monétaire. C’est faux sinon, on pourrait même effacer la dette sans que le système international s’écroule puisqu’il suffit aux banques centrales de recréer cet argent manquant. Bien sûr, les banques internationales refuseraient de prêter ensuite mais elles n’auraient à le faire que si la balance commerciale est en déficit. Quant aux capitaux en fuite, un contrôle des changes les empêcherait de revenir et l’état pourrait créer toute la monnaie nécessaire à l’économie interne sans faire de dettes. On pourrait ensuite recréer une monnaie commune à certains états européens assez proches en niveau de vie sur d’autres bases, en plus des monnaies nationales (voir l’article de l’économiste Frédéric Lordon dans le monde diplomatique d’aout 2013)

Il est urgent de réagir si on ne veut pas être complètement dépecés, comme la Grèce actuellement, et la France en a encore les moyens. Mais pour cela elle doit renoncer à cette fausse union européenne qui n’est qu’une construction néo libérale non démocratique destinée à terme à détruire les états et elle doit retrouver la souveraineté de sa monnaie et de ses frontières. Elle ne pourra trouver sa légitimité à le faire qu’en adoptant une nouvelle constitution qui écrira ces principes dans le marbre. Elle sera alors en position de force pour renégocier sa dette et les traités européens : elle pèse encore assez pour ne pas être envahie militairement et son expérience servira d’exemple aux autres peuples d’Europe et d’ailleurs qui souffrent aussi de cette domination de l’argent ; la France retrouvera le rôle de phare des libertés qu’elle a eu autrefois.

Mais cette nouvelle constitution, on ne va pas nous en faire cadeau et il ne faut pas compter sur les politiques actuels pour la faire. Elle ne peut être faite que par le peuple pour le peuple. Toutes les constitutions précédentes ont été faites par des « élites » pour des « élites » convaincus que le peuple était incapable de participer à sa gouvernance. Et si vous pensez que c’est une tâche trop difficile pour être faite par des non spécialistes, lisez celle de la 5ieme république qui nous gouverne (trouvable sur internet): elle est d’une simplicité désarmante : après une vague allusion à la déclaration des droits de l’homme (mais sans valeur contraignante), elle se contente de décrire les énormes pouvoirs du président de la république et ses rapports avec les autres institutions : parlement, sénat, conseil constitutionnel. C’est une constitution écrite par De Gaulle pour De Gaulle qui a pu fonctionner pour lui car il plaçait la haute idée qu’il avait de la France au-dessus de ses intérêts personnels mais qui n’est plus adaptée aujourd’hui.

Un peu partout en France, des associations se sont formées pour réclamer ou commencer à écrire cette constitution. Il est nécessaire de rassembler en un seul texte tous ces travaux épars pour le présenter au vote d’une majorité de Français. Je propose de faire un site internet qui regroupe et ordonne tous ces articles, auquel chacun pourra participer en fonction de ses compétences et du temps dont il dispose. Même si vous disposez de très peu de temps, un simple vote pour ou contre chaque article est important : si une majorité de Français pouvait s’unir pour ce projet commun et non pas seulement contre quelques-uns, une révolution tranquille pourrait se faire.

 

Un coup d’état financier contre Athènes par Vicky Skoumbi

Un plan de déstabilisation financière et politique de la Grèce est en cours depuis quelques semaines. A vrai dire, c’est bien avant l’élection de Syriza, que le processus a été mis en route, mais son accélération intensive les derniers jours jette une lumière vive sur celui-ci.  Il s’agirait de rien de moins que d’une tentative de renverser le  gouvernement Syriza  pour que celui-ci soit enfin remplacé une  coalition de la convenance de créanciers. Le chantage odieux exercé sur le gouvernement grec, par le biais d’une incitation ouverte à un bank run ne laisse aucun doute sur la volonté des créanciers d’en finir une fois pour toutes avec un gouvernement qui ose contester leurs diktats et refuse de faire boire au peuple grec jusqu’à la lie la potion létale que Bruxelles, BCE et FMI ont savamment concocté pour lui. Doit-on rappeler ici que les programmes de « sauvetage » qui n’ont sauvé personne à l’exception notoire de banques européennes, grecques comprises, n’ont pas manqué de produire une telle chute du PIB, une telle baisse du niveau de vie que même une guerre menée par des moyens militaires n’aurait su produire. La nouveauté aujourd’hui consiste au fait que le trio infernal de la Troïka a décidé de mettre délibérément en danger le système bancaire grec afin de faire tomber un gouvernement qui, malgré les pressions terrifiantes,  a osé lui tenir tête pendant cinq mois. Après tout, il n’est pas interdit de mettre en danger quelques petites banques périphériques si c’est pour rafler la mise sur le plan politique et économique. Ces affirmations qui pourraient, aux yeux de certains, paraître exagérées voire gratuites, s’appuient sur des faits.

Déstabilisation économique

Le lendemain du Eurogroupe du 18 juin, M. Tusk a su trouver la bonne formule pour résumer la situation, la Grèce aura à choisir entre ou bien le projet que proposent les créancier, ou bien la faillite, a-t-il déclaré. Mais ces messieurs qui sont censés de veiller sur la sauvegarde des intérêts des peuples européens, ne se sont pas contenter de mettre un gouvernement élu devant ce choix forcé. La faillite ils ne limitent pas à l’évoquer ; ils l’organisent sournoisement et méthodiquement par des rumeurs, de vraies fausses annonces aux médias, de fuites savamment orchestrées, qui toutes laissent planer depuis plusieurs jours la menace d’un scénario à la chypriote. Par un jeu calculé de déclarations alarmantes ils préviennent de l’imminence  d’un capital control en Grèce et poussent délibérément les épargnants grecs de faire de retraits massifs,  qui n’ont pas manqué à  conduire les banques au bord du gouffre. Dresser ici un inventaire exhaustif de faits et gestes incitant à la panique bancaire n’est pas possible; je vous renvoie à l’excellent compte rendu qu’en fait  Romaric Godin dans la Tribune ainsi qu’à l’analyse de Martine Orange dans Mediapart.

Je mentionne juste deux exemples : le refus de  la Commission de démentir l’article de SDZ qui évoquait la possibilité d’un contrôle de capitaux et la vraie fausse rumeur lancé par les soins de M. Queré,  selon laquelle, il se pourrait que les banques grecques ne s’ouvrent pas lundi dernier. Une fois cette prévision catastrophique démentie par les faits, le spectre de la fermeture bancaire s’est savamment déplacée vers …mardi !  Que faudrait-il de plus pour que les épargnants se ruent vers les agences les plus proches? La très honorable institution qui se doit d’assurer la stabilité du système financier européen, n’accorde chaque jour qu’une somme «insuffisamment suffisante », pour maintenir les banques grecques tout juste à flot, mais toujours au bord du gouffre. Bref les responsables européens avec l’aide de leur amis du FMI recourent ici au bon vieux schéma de la prophétie apocalyptique, qui, en semant la panique, finit par s’accomplir, du fait de sa seule énonciation publique. Le but de l’opération étant d’obliger le gouvernement Tsipras de décider ses prochains mouvements sous la menace imminente d’un « accident » bancaire. Ce qui pourrait expliquer les concessions supplémentaires que le gouvernement grec a fait en acceptant une hausse de la TVA et une augmentation de cotisations de retraités. Pour compléter le tableau, juste avant la réunion du 24 juin, un dignitaire européen a jugé bon de rappeler à notre mémoire le scénario à la chypriote, dont la répétition pourrait intervenir à tout moment.

Mais cela n’a pas suffi, la preuve, la nouvelle proposition de trois institutions, qui en fait ne diffère que très peu de la précédente, exige de nouveaux baisses de retraites et de salaires dans le but évidente mais non avoué d’enfoncer encore plus la Grèce à une misère économique et sociale la plus totale. Prenons juste un exemple parmi les mesures préconisées, à savoir que le taux d’imposition des agriculteurs passe du 13% au 26 voire au 33%, et la diminution de moitié de la réduction de taxes sur le pétrole destiné aux travaux agricoles. Pareilles mesures, si elles venaient de s’appliquer sur une agriculture à l’agonie, pousseraient la grande majorité des cultivateurs de renoncer à leur métier et de brader leur champs pour moins que rien. Sous pretexte de multiplacation de recettes de l’Etat, ce qui est tout simplement point envisageable car on ne peut rien tirer des gens ruinés, la terre arable grecque changerait de mains.  J’ajoute que selon Wolfgang Münchau la proposition précédente de ceux qui prétendent parler au nom de l’Europe, et qui diffère très peu de celle actuellement sur la table, ne manquerait pas de produire un effet récessif de 12,6% sur quatre ans, et que la dette risquait d’atteindre le 200% du PIB en 2019. Avoir mis sous tutelle un pays dont la dette s’élevait à 120% en 2009 pour la sauver de la faillite, et la  conduire  grâce aux conditionnalités de l’ « aide » accordée, à 200%,  c’est un brillant exercice de destruction massive, qui pourrait servir d’exemple à tous ceux et celles en Europe qui trouvent que l’austérité est un remède qui tue. A ce propos, on aimerait bien savoir sur  quelle logique,  M. Moscovici s’appuie pour affirmer qu’un paquet de 11 milliards d’économie étalées en 18 mois, imposé à un pays en  dépression, ne constitue point un plan d’austérité.

 

Des acolytes bien commodes

Il est à noter que les déclarations catastrophistes les plus redoutables  venaient de l’intérieur même du pays. Le bal fut ouvert par Mme Bakogianni qui depuis le 24 mai déjà avait affirmé l’imminence d’un capital control qui pourrait intervenir dans le long week-end de la Pentecôte. M. M. Géorgiadis, transfuge de l’extrême droite au sein du gouvernement précédent et vendeur de pamphlets antisémites, n’a pas manqué à apporter sa propre touche à l’édifice. Cependant, celui qui a vraiment donné le coup de grâce  fut le directeur de la Banque de Grèce, M. Stournaras. Celui-ci, en outrepassant abusivement les limites de sa fonction en tant que garant de la stabilité financière grecque, a jugé bon de publier, la veille de l’Eurogroupe du 18 juin, un rapport qui prévoyait des catastrophes cataclysmiques, si jamais un accord avec les créanciers n’était pas signé tout de suite.

Terrorisme financier

Mais la BCE n’en est pas à son premier coup. En matière de chantages aux liquidités et d’ultimatums, M. Jean-Claude Trichet avait s’est avéré maître à la tête de la BCE. Les Irlandais en ont goûté la saveur, lorsqu’en novembre 2010 et sous la menace du tarissement de liquidités, ils furent forcés de signer un mémorandum qu’ils s’obstinaient jusqu’alors à rejeter. On peut également évoquer l’éviction de Papandréou de son poste de Premier Ministre, une fois que celui-ci avait eu la très mauvaise idée de proposer en novembre 2011 un référendum. Quant au ‘bail in’ chypriote, on aurait tort à oublier le chantage ouvert qu’a exercé encore une fois la BCE, en menaçant de couper les liquidités aux banques chypriotes. Cet exercice de haut vol de terrorisme financier a prouvé encore une fois en Chypre son efficacité : il a obligé le Parlement chypriote de revenir sur sa décision initiale et d’accepter le 22 mars 2013 le même bail in que trois jours avant il avait rejeté.

Cependant l’exemple le plus instructif reste celui qui concerne la fuite de capitaux ‘téléguidée’, pendant la période électorale entre les élections de mai et celles du mois du juin 12 en Grèce. Une étude de Peterson Institute datée de mai 2012 sous le titre parlant Comment un bank run peut faire partie de la solution décrit en détail de quelle manière une panique bancaire en période électoral pourrait s’avérer forte opportune pour  pousser les électeurs à se détourner de Syriza. Son auteur, M. Jacob Funk Kirkegaard, ne mâche pas ses mots : «un bank run accéléré en Grèce pourrait offrir quelques opportunités. Nous devons donc s’attendre à aucun répit sur le front de menaces de la part des dirigeants d’Eurozone. En effet, ces dirigeants peuvent encourager secrètement la panique bancaire, une stratégie qui révèlerait aux yeux de tous, le caractère fallacieux et trompeur du programme électoral de Syriza. Si les déposants des banques grecques ne peuvent pas faire confiance  aux promesses d’Alexis Tsipras concernant leur argent propre, pourquoi ils voteraient pour lui ? » Et l’excellent homme  pousse son raisonnement jusqu’à dire « tout un chacun qui veut maintenir la Grèce dans l’Eurozone se doit de retirer de l’argent aux banques ». On ne peut pas être plus clair, je crois. Il ne faut surtout pas imaginer que ce scénario-là était resté lettre morte à l’époque. Entre mai et juin 2012, résonnaient sans cesse à nos oreilles les  dignitaires européens  du plus haut rang n’ont eu cesse de nous prévenir des catastrophes apocalyptiques se produiraient si jamais Syriza  gagnait les élections (voir ici un article relatif et l’appel que nous avons lancé, à l’époque, Etienne Balibar, Michel Vakaloulis et moi-même).  Tout au long de cette période électorale, on a pu constater  une fuite considérable de capitaux vers l’étranger, dont une grande partie fut rapatrié  juste après la formation du gouvernement Samaras. Une véritable campagne d’intimidation avait été lancée en interne et en externe afin de terroriser les électeurs avec la perspective de la perte de leur épargne et d’une fermeture imminente des grandes entreprises, si, par malheur, Syriza l’emportait. Une grande banque systémique grecque, Eurobank pour ne pas la nommer, avait même donné la consigne à ses employés de bien prévenir la clientèle de la fermeture certaine de la banque, si Syriza l’emportait, après quoi leurs économies seraient partie en fumée.

Mais nul besoin de remonter si loin pour trouver des précédents. Début février la BCE avait annoncé la suppression de lignes de financement des banques grecques, qu’elle acceptait depuis 2010. «Les responsables de la banque centrale ont annoncé que l’institut monétaire mettait un terme à partir du 28 février – dans les faits, la mesure devrait prendre effet dès le 11 février pour des raisons techniques – à la clause qui lui permettait d’accepter les titres grecs, classés aujourd’hui en junk bonds, que les banques grecques placent en dépôt de garantie pour obtenir des crédits bancaires. Pour les banques grecques, privées de tout accès aux financements interbancaires, ce dispositif est essentiel pour assurer leur financement», écrivait  Martine Orange. Après donc avoir accepté pendant plusieurs années d’acheter de titres qui étaient classés très bas dans l’échelle d’évaluation, subitement la BCE a commencé à se poser des questions sur la qualité de ces titres en se souvenant tout d’un coup que son règlement lui interdit d’acheter de titres qui ne sont dotés du fameux triple AAA. Il va de soi que le moment ne fut pas choisi au hasard : Syriza venait d’emporter les élections du 25 janvier et les négociations avec les créanciers venaient juste de commencer.

Toutefois, la sortie systématique de la BCE de ses prérogatives ne s’arrête pas ici. L’honorable institution refuse de rendre à la Grèce, les gains qu’elle a faits sur les obligations grecques achetées dans le cadre  du programme SMP (Securities Market Program, un programme d’achat  des obligations les plus attaquées sur le marché afin de faire baisser les taux d’intérêt). Ces gains pour la seule année 2014 s’élève à 1,9 milliards. Bref, la BCE, au même titre que n’importe quel spéculateur, profite allègrement de taux d’intérêts très élevés de cette catégorie de titres, et elle en ce moment critique où l’économie grecque est à l’asphyxie,  refuse de payer à la Grèce son dû,  si celle-ci ne cède pas aux exigences exubérantes de créanciers. Car à partir du 1/1/2013 les intérêts perçus sur ces titres grecs doivent obligatoirement être rétrocédés aux banques centrales nationales qui elles-mêmes les mettront à la  disposition du pays émetteur du titre. Mais l’ « exception » grec autorise quelques écarts par rapport aux accords que les institutions ont signés avec la Grèce. Non pas que cela ne se fait pas également au détriment d’autres pays comme le Portugal. Quoi qu’il en soi, dans le cas de la Grèce ces types de pratiques constituent plutôt la règle que l’exception.

Un scénario assez semblable au bank run de mai 2012, est  en cours aujourd’hui, sauf que maintenant l’implication des institutions européennes se fait  ouvertement et non plus à mot couvert. Comme l’a révélé Martine Orange dans son article Grèce : les créanciers instaurent la stratégie de la terreur, une étude de la très honorable Goldman Sachs avait déjà tout prévu depuis le mois de décembre : « Cette volonté de semer l’inquiétude ressemble tant au scénario de Goldman Sachs, établi dès décembre, où s’enchaînaient panique bancaire, fermeture des banques, contrôle des capitaux, capitulation politique, mise sous tutelle économique et nouvelles élections, que cela en devient troublant». «Tout au long de la semaine, les créanciers et la BCE ont tout fait pour déstabiliser les déposants grecs. Et placer le gouvernement grec devant un choix impossible » remarquait de sa part Romaric Godin.  Faudrait-il rappeler ici que M. Mario Draghi fut pendant des longues années le représentant attitré de Goldman Sachs en Europe ?

 

Déstabilisation politique

Mais Goldman Sachs n’en était pas à son dernier coup. Le site économique grec capital.gr relate que la  très honorable maison prévoit un défaut imminent de la Grèce dans l’euro, accompagné d’un capital control. GS précise que la période chaotique qui pourrait suivre comporte tout de même « le risque d’une sortie de l’euro au lieu de conduire au changement politique qui permettrait d’arriver à un accord » (c’est moi qui souligne). Au cas où nous n’aurions pas compris quel est le changement politique que l’honorable maison appelle de ses vœux, elle en dresse les contours d’une façon on n’en peut plus claire. Le capital control ruinerait la confiance des électeurs au gouvernement, de sorte que la voie vers « un nouvel équilibre politique interne » soit enfin ouverte – par « nouvel équilibre politique, entendre une nouvelle configuration de la carte politique grecque entre les partis, qui permettra d’arriver finalement à la conclusion d’un accord. Cette recomposition de la scène politique grecque qui serait atteinte grâce aux turbulences d’une période trouble de transition, implique nécessairement des nouvelles élections ainsi que la formation de coalitions inédites, nous verrons par la suite lesquelles. Le tout rendra possible le maintien de la Grèce dans la zone euro sous un  gouvernement suffisamment docile aux diktats des créanciers.

Si ce qui vient d’être décrit n’est pas un scénario de déstabilisation méthodiquement planifiée d’un gouvernement élu, qu’est-ce que c’est ? En provoquant un bank run, en ouvrant la voie vers le capital control qui dressera la population contre le gouvernement actuel, certains espèrent  avoir raison de Syriza. Qui plus un accord au contrepied du programme électoral de Syriza, que les créanciers veulent imposer manu militari,  constituerait l’occasion rêvée pour que la coalition de gauche radicale  qu’est Syriza vole en éclats. Une scission au sein de Syriza permettrait d’isoler le bon grain de l’ivraie et ouvrirait la voie à un autre gouvernement de coalition. Remarquons que la dernière mouture de la proposition des créanciers comporte une coupe de 400 millions dans le budget de la défense. Pareille baisse dans le budget de la défense aurait pu être la bienvenue, si elle ne comportait pas une certaine arrière-pensée. ANEL, la droite souverainiste qui est l’allié actuel de Syriza, est particulièrement attaché au maintien d’un budget militaire considérable. Certes dans les programmes précédents il y a eu des quelques coupes du budget de la défense, mais, que je sache du moins, jamais de cette ampleur. Alors on ne peut que s’étonner comment ceux qui au début du programme de « sauvetage », ont exigé que la Grèce honorent les contrats signés pour l’achat d’armements au grand profit de la France et de l’Allemagne, tout d’un coup, par une illumination divine, exigent non seulement de coupes mais de baisses d’effectifs, comprendre licenciement des militaires  professionnels. Scission donc de Syriza, éclatement de la coalition avec ANEL, voici quelques éléments ouvrant une voie royale  vers un autre gouvernement plus commode.

Rôle clef à ce processus, est appelé à jouer M. Stavros Théodorakis, un présentateur télévisuel, qui se trouve actuellement en tête de Potami, réputé pour ses accointances avec le cercle des créanciers. Précisons que S.Théodorakis prône ouvertement la  nécessité des coupes budgétaires avec baisse de retraites, et s’oppose à toute idée  de restructuration de la dette ainsi qu’à toute augmentation d’impôts de couches supérieurs de la société. Ce dirigeant d’une formation qui n’a fait plus que 6% aux dernières élections, est, dans le contexte actuel, l’interlocuteur  privilégié de Bruxelles. Il multiplie les rencontres avec  M. Junker, M. Sapin, M. Moscovici et M. Schulz, ce dernier ne manquant pas d’occasion pour affirmer que c’est bien avec Potami que Syriza aurait dû former un gouvernement de coalition, et participe même à des dîners avec des chefs d’état ! Comble de l’affaire,  ce chantre des intérêts de créanciers se présente en Grèce comme un porte-parole officieux de Bruxelles, faisant part aux  grecs du mécontentement de M. Junker devant la « intransigeance »  supposée du premier ministre grec.

Si par malheur ces manœuvres ne  réussissent pas à le faire plier, on peut compter sur l’usure qui pourrait saper la popularité de Tsipras auprès d’une population qui, jusqu’à maintenant, continue contre vent et marée à lui accorder son soutien. Cette usure sera assurée si Tsipras est amené à appliquer de mesures d’austérité, imposées par les créanciers.  La chose pourrait être facilitée par un coup de main opportun et un bank run organisé ferait bien l’affaire. Les créanciers seraient mêmes disposés de conduire la Grèce au défaut, tout en faisant porter la responsabilité de celui-ci à Syriza.  Il s’en suivra nécessairement une première période confuse sinon chaotique, particulièrement  propice à des manifestations dites « de casserole » dans la veine de celles organisée au Chili d’Allende,  qui contribuerait à faire tomber le gouvernement. Je dois ajouter ici que chaque fois où les négociations se trouvent à un point crucial, des groupes qui se disent anarchistes, créent des incidents violents aux alentours de l’Ecole Polytechnique, en brûlant des voitures, cassant des vitrines etc. Il se peut que ils s’agissent  effectivement des anars mais la coïncidence avec les réunions du Europe aussi bien que l’attitude tolérante de la police à leur égard laisse songeur.

Pour ceux qui pourraient voir à l’analyse qui précède, une énième théorie du complot, je propose de prêter l’oreille à un économiste peu suspect de verser dans le complotisme à savoir Romaric Godin: « L’Europe doit donc de toute urgence abandonner ses buts politiques et accepter enfin le résultat de l’élection du 25 janvier. Elle doit aussi respecter sa propre parole, celle qui, le 20 février, affirmait que la Grèce devait décider de ses propres réformes dans le cadre du programme. (Souligné par moi). »

 

Des amis qui vous veulent du bien

J’en viens aux faits et gestes politiques qui permettent d’affirmer qu’un plan de renversement du gouvernement Tsipras est lancé par Bruxelles. Stavros Théodorakis, encore lui, fut invité par la Commission et reçu par M. Junker le jour même où le premier ministre a été convoqué à Bruxelles. Notons qu’il ne fut pas le seul à se rendre à Bruxelles le mercredi 24 juin mais s’y sont précipités tous ceux qui vont être appelés à former un gouvernement obéissant, une fois Tsipras évincé. On y a vu M. Samaras dont les déclarations étaient plus qu’explicites : il propose un gouvernement d’unité nationale sans M. Tsipras en faisant quand même la conssession de s’abstenir de toute participation personnelle au schéma proposé. En même temps le nom de M. Karamanlis commence à circuler; celui-ci pourrait en effet se présenter comme un recours possible, dans la mesure n’ayant occupé  aucun poste gouvernemental depuis septembre 2009, il est moins usé que ceux, compromis dans la gestion des memoranda.  Quant à M. S. Théodorakis, toujours lui, du haut de ses 6% de voix et de sa science économique, vient de donner une interview au FT où il précise qu’il est à la disposition de qui veut l’entendre pour un remaniement gouvernemental. Mais le 24 juin a également été reçue à Bruxelles Mme Gennimata qui vient de succéder à M. Vénizelos à la tête du Pasok, forte de 289.482 voix que celui-ci avait récoltées aux dernières élections. J’invite le lecteur de réfléchir un instant pour se poser la question suivante : que pouvait faire tout ce beau monde à Bruxelles, au moment où les négociations  avec les créanciers se trouvent à leur point critique,  sinon se présenter comme une alternative « sérieuse »  au gouvernement actuel, qui, quant à lui, ne serait pas composé des personnes responsables et  des adultes (Lagarde dixit) ?

Coup d’état financier

Deux scénarios se dessinent : Ou bien il faut obliger le gouvernement Tsipras à la capitulation totale en acceptant de mesures exceptionnellement dures auxquelles il faudrait éventuellement ajouter l’arme majeur du capital control, ce qui ne manquerait de le discréditer aux yeux de l’opinion, ou bien il faudrait provoquer une scission opportune au sein d’un Syriza pour introniser  ensuite  un gouvernement de coalition avec la soi-disant bonne partie de Syriza où M. Théodorakis jouera un rôle de premier ordre. Une combinaison de deux reste bien entendu possible.  Le tout dans une persective de défaut qui. Pour éviter les malentendus, je précise que j’appelle de mes vœux une cessation de paiement même si cela se traduit par un défaut, sous la condition qu’il soit soigneusement préparé et encadré. Sans cela, il pourrait déclencher un enchaînement d’évènements incontrôlables qui mènerait à la chute du gouvernement.

Ce que vient d’être décrit ici porte un nom, ce n’est rien d’autre qu’un coup d’état financier où à la place des tanks  on fait appel aux banks! Un coup d’état fomenté par les institutions européennes, voilà le visage de l’Europe que les dirigeants européens souhaitent donner à voir à leurs peuples. Je ne saurais dire si ceux-ci toléreront ces agissements. Les trois de la ex-Troïka, malgré leur dissensions internes, font tout pour dresser les citoyens européens contre les Grecs en leur  faisant croire que ils ont payé et continueront à payer pour le sauvetage de la Grèce. Ce que l’on oublie à dire, est que, le programme qui fut présenté en 2010 comme un plan d’ « aide »  à la Grèce, n’était en réalité qu’un généreux plan de sauvetage de banques européennes exposées à la dette grecque. Tous les économistes qui se respectent s’accordent aujourd’hui sur ce point : à l’époque il aurait fallu faire une restructuration importante de la dette grecque qui la rendrait viable, avant d’entreprendre n’importe quelle  mesure pour la suite  Or, une telle restructuration aurait pu faire perdre 30 milliards à peu près aux banques européennes, au premier rang desquelles se trouvaient BNP Paribas, Société Générale et la Deutsche Bank. Et pour que celles-ci n’accusent pas une perte qui aurait nécessité leur recapitalisation au frais du contribuable, un sauvetage qui n’a pas manqué de la ruiner a été imposé à la Grèce. Bref, ce qui fut présenté comme un plan d’aide à la Grèce n’a été qu’une recapitalisation  indirecte des banques, qui ont eu tout leur aise pour se débarrasser à temps les obligations grecques avant la restructuration de 2012 qui a permis que la patate chaude passe du secteur privé vers les états. Le fait est confirmé par la toute récente déposition de Panayotis Rouméliotis à la commission parlementaire Vérité sur la dette. Rouméliotis qui représentait à l’époque la Grèce au sein du FMI, a révélé que des représentants de grandes banques européennes furent reçus à plusieurs reprises par l’équipe du FMI à Athènes afin d’éviter une restructuration qui les prendrait de court. Force est de constater, l’appel Sauvons le peuple grec de ses sauveurs que nous avons lancé en février 2012 n’a malheureusement rien perdu de sa pertinence.

 

Négociations ?

 

J’espère que cette stratégie des créanciers qui met en danger, non pas seulement la Grèce mais l’Europe dans son ensemble, soulèvera un vent de protestations sans précédent partout dans le monde. Car, si les créanciers arrivent à leur fins, si ce coup d’état financier monté par les institutions européennes et le FMI réussit,  il ne restera plus rien de l’idée européenne. Des cendres calcinées de celle-ci émergera non pas le visage « complaisant » du chef de Potami, mais celui, odieux de l’Aube Dorée.  A qui d’autre pourrait profiter le sentiment d’une impuissance totale et enragée qui résultera inévitablement devant le spectacle des manœuvres qui vous laissent aucune prise sur votre propre destin? Faire preuve de tant d’aveuglement au moment où partout en Europe des parties d’extrême droite et des formations ultranationalistes ouvertement racistes prennent le pas, c’est dire jusqu’où les dirigeants européens sont disposés d’aller pour imposer le dogme néolibéral. Ou bien il ne s’agit point d’aveuglement mais d’un choix délibéré ? Certes il y en a quelques-uns parmi le cénacle de dirigeants qui, face à ce danger, optent pour un scénario plus soft, celui non pas de l’éviction immédiate  mais de la prolongation de six mois du programme sans restructuration de la dette, six mois pendant lesquels Syriza sera sommé d’appliquer les contre-réformes préconisées partout en Europe comme un remède miracle à la crise. Un tel scénario présente l’avantage de compromettre les chances de Podemos et d’autres formations affines. Mais il n’empêchera point la montée en force de l’Aube Dorée qui serait en droit dans ce cas d’affirmer que les politiciens sont tous « les mêmes». A qui d’autres pourrait profiter la conviction que les politiques sont ‘tous vendus’ qui ne manquera pas de s’imposer à l’opinion ?

Le dernier rebondissement avec le durcissement maximal des créanciers qui se sont réglés sur les positions libérales à outrance de Mme Lagarde ne fait que confirmer l’hypothèse d’une stratégie de déstabilisation. Il est à noter que cette nouvelle provocation  intervient juste deux jours après que les représentants de trois institutions avaient accepté comme une bonne base de discussion les positions grecques, tandis que   deux jours après le texte présenté par les créanciers tordait le coup à l’esprit initial du texte grec, qui de son côté consistait à faire porter le maximum de charges aux entreprises bien portantes et non pas uniquement sur les épaules de plus faibles très  fragilisés par de coupes successives de revenus. En somme les propositions du FMI adoptée par les créanciers dans leur ensemble,  sont si extrêmes qu’elles ne sauraient qu’être rejetées. Si par bonheur Tsipras, sous la menace de la faillite, signait un accord plus dur que celui proposé à Samaras, quelle aubaine ! Les  peuples européens doivent enfin comprendre que celui qui sort du droit chemin paie la rançon forte.

Les institutions européennes se sont avérées de véritables maîtres ès manipulation et vraies fausses négociations. Un vrai mécanisme médiatique s’est mis au service de cette stratégie. De faux bonds en retournement de veste, de déclarations qui étaient faite pour s’annuler un jour après, des engagements pris et cyniquement et ouvertement non tenus, depuis cinq mois ils n’avaient que  fait semblant de négocier, afin de repousser la chose jusqu’au mois de juin, à la fin duquel la Grèce, sans prolongation du programme, ne touchera pas la dernière tranche d’aide. Pour que ses ajournements incessants passent à l’opinion, les créanciers n’ont pas manqué de dénoncer l’« intransigeance »  irresponsable du gouvernement grec. Et ils l’ont fait  au moment où ils l’obligent par le tarissement de liquidités, de reculer considérablement  à l’égard à ses positions initiales. Tout avait bien commencé par un coup tordu : comme l’a révélé Paul Mason, journaliste au Channel 4, Varoufakis était arrivé au Eurogroupe du 16 février une des propositions de Moscovici en mains, pour découvrir que ce n’était point sur celle-ci que portait la discussion mais sur un texte beaucoup plus dur que Daiselboum allait sortir pendant la réunion.  En  faisant circuler des contre-vérités, en traitant comme nulle et non advenu la proposition de 47 pages déposée par Syriza début juin. Ce texte ne reprenait point les positions propres du gouvernement grec, mais bel et bien celles issues de quatre mois de pourparlers inutiles. Ainsi les institutions européennes ont réussi à repousser les vraies négociations vers une période critique où le gouvernement grec est obligé de verser plusieurs remboursements. Mais les dignitaires de Bruxelles ont voulu y voir un document irrecevable puisque non conforme à leurs  diktats.  Fin juin, ils croyaient avoir réussi de coller Tsipras dos au mur et escomptaient  rafler ainsi la mise. C’est à ce moment que,  pour gagner encore du terrain de l’adversaire, ils ont sorti  le bazooka du bank run orchestré, comme arme de destruction massive. Mais Tsipras tant bien que mal continue  à résister. Certes il a fait de concessions dont plusieurs sont inacceptables, comme les privatisations, mais il continue à ne pas accepter une capitulation totale et sans conditions.  Et sur ce point,  même si l’on n’est pas d’accord sur sa stratégie, il faudrait lui rendre un  hommage appuyé ; tenir bon lorsqu’on est seul dans la fosse à lions, demande un certain courage voire un courage certain.

Devant tant de mauvaise foi, tant d’arrogance, tant de perfidie qui s’ordonnent à une stratégie de déstabilisation d’un gouvernement qui dérange, j’aimerais inviter le Premier Ministre grec à suspendre les paiements des créanciers jusqu’à ce que la croissance revienne en Grèce. Il serait utile de rappeler ici que selon le rapport provisoire de l’audit de la dette grecque, celle-ci a explosé entre 1980 et 2010, non pas  à cause de dépenses licencieuses mais dès par l’effet conjugué de taux d’intérêts très élevés et de la course aux armements.

Tous égaux devant la loi ?

Mme Merkel ne cesse de demander plus d’effort aux Grecs. On ne saurait que lui donner raison. C’est vrai que une hausse  de 45% de mortalité infantile, de 42% du taux de suicides, accompagné d’une baisse de trois ans de l’espérance de vie ne lui donnent pas entière satisfaction. De même, le taux de de retraités qui vivent en dessous du seuil de pauvreté (44,6%),  est sans doute scandaleusement bas. Encore un effort doit donc être fait par  ce ramassis de privilégiés qui passent leur temps à bronzer au soleil pour atteindre un chiffre qui témoignerait de leur volonté de se mettre enfin au travail. Ce qui voudraient dire pour les plus vulnérables parmi eux, qu’ils se décident enfin d’apporter leur contribution à la réussite des programmes d’ « aide », en ayant la politesse de se laisser mourir. Si l’on ajoute à cela que le plus grand hôpital du pays, Evangélismos, n’a plus de quoi continuer à fonctionner que jusqu’à la fin juillet, il devient on ne peut plus clair que l’effort qu’est demandé aux grecs n’est autre qu’une accélération intensive du travail de la mort. Force est de constater que l’Europe telle qu’elle fonctionne aujourd’hui s’avère un mécanisme redoutable de thanatopolitique, tant à l’endroit des migrants à qui elle offre une place dans les fonds marins, qu’à l’endroit des populations vulnérables considérées comme superflues qui sont invités de presser le pas vers la paix éternelle.

Pour ceux qui pourraient trouver que ces affirmations gratuites, je voudrais rappeler la réponse de commissaire aux Affaires économiques et monétaires de l’époque, à une question d’eurodéputés de Syriza qui, en en septembre dernier dénonçait la violation systématique des droits sociaux, économiques et humains de la population grecque les quatre dernières années, en s’appuyant sur un rapport relatif de N.U de Cephas Lumina pendant.   L’excellent M. Jyrki KataÏnen  n’a pas hésité un instant de dire que la validité de la Chartre de Droits Fondamentaux de l’UE est suspendue en Grèce mais aussi dans tous les pays sous programme, dans la mesure où les Memoranda n’ont pas à être soumis au droit communautaire. Une bévue d’un ultra ? Voyons ce qu’en décembre dernier, son successeur, le très socialiste  M. Moscovici, avait répondu à une question   d’eurodéputés de Syriza sur le non- respect du Droit de travail en Grèce. Selon lui, les Memoranda ne sont que des accords intergouvernementaux et en tant que tels se soustraient du Droit Communautaire. Bref ce qui est affirmé sans ambages ici, est le fait que le principe fondateur de la démocratie depuis Solon, à savoir l’isonomie, n’est plus valable ni pour les Grecs ni pour les autre pays sous la tutelle de la Troïka. En somme, ce dont il s’agissait c’était l’instauration des véritables de zones de non-droit au sein de l’Europe, qui fonctionneront comme haut-lieux d’une exploitation extensive, d’autant plus que du Droit du Travail, il ne reste presque rien. Un presque rien que les créanciers trouvent excessif et s’efforcent à rendre équivalent à zéro. Cette création des zones économiques spécialisées, régies par la seule loi du plus fort, ne sert pas uniquement la maximalisation de profits sur place mais l’intimidation  de ceux qui ailleurs en Europe se mettront à résister à l’offensive néolibérale. Si jamais vous vous mettez en tête que c’est à votre pouvoir de changer quoi qu’il en soit, voilà quel sort vous attend. Il est largement temps de se poser la question  quel est le régime où les droits fondamentaux d’un texte fondateur de l’UE sont valables –même si ce n’est qu’en théorie – pour les uns, et non pas pour les autres, en fonction de leur pays de résidence et de leur appartenance ethnique. Je laisse au lecteur le soin d’en tirer les conclusions qui s’imposent.

De nos responsabilités

De tout ce qui précède on peut conclure que l’Europe de M. Junker, Schulz, Moscovici et Dijsselbloem n’est qu’une structure de pouvoir téchno-financier dont la seule raison d’être est le sauvetage à tout prix de banques, quitte à en sacrifier quelques-unes de la périphérie pourvue que le résultat politique est là. Car cette technostructure européenne, dotée d’un mécanisme qui peut sème la terreur aux marchés, et pourvu d’un dispositif thanatopolitique, a comme but  de « neutraliser la démocratie », lorsque celle-ci comporte un risque de rupture. Et tout moyen est bon, même la faillite du système bancaire grecque si c’est pour arriver à ses fins qu’est de faire tomber un gouvernement élu qui n’est point révolutionnaire mais se bat tant bien que mal de défendre les droits du peuple dont il est représentant

Devant cette attaque sans précédent à la notion de l’isonomie, devant cette mise à mort de la démocratie dans le pays-même qui l’a vue naître, pourrions-nous rester muets ? Plusieurs d’entre vous ont déjà entrepris des initiatives, des textes, des actions de solidarité avec les grecs, ce dont je les remercie de tout cœur. Mais aujourd’hui un seuil a été franchi. Il ne s’agit plus ni du sort des grecs ni de celui de l’Europe. Ce qui est en danger est cette infime marge de démocratie que nos dirigeants daignent bien nous laisser encore. Un coup d’état est en train d’avoir lieu devant nos yeux, et il n’est pas possible de se taire. Faisons entendre nos voix partout dans le monde. Il y va de notre responsabilité.

Athènes, le 25 juin 2015

Vicky Skoumbi

Annexe

Du paquet Junker pour la Grèce, du respect de règles européennes,  et d’autres histoires à dormir débout

 

Les dirigeants européens rivalisent à qui mieux mieux en double langage et contre-vérités ; le soi-disant « ami » de Grecs au sein des institutions européennes qui faisait jusqu’à récemment étalage des amabilités à l’endroit de Tsipras, M. Junker pour ne pas le nommer, veut nous faire croire qu’il offre à la Grèce un généreux paquet de  35 milliards, étalé sur cinq ans et  destiné aux investissements. Certains se sont précipités de le nommer « paquet Junker ». Mais des journalistes qui honorent leur  profession, sont allés voir de plus près de quel est ce paquet que le président de commission offrirait en cadeau à la Grèce. Or, il ne s’agit de rien d’autre que des fonds structurels faisant partie d’un « repackaging » de fonds non utilisés. La Grèce, en tant que membre à part entière de l’UE, y a droit au même titre que les autres pays membres, indépendamment de toute conditionnalité et certainement pas en fonction de l’issue des négociations. Cependant M. Junker ne se contente pas de présenter comme un «  plan pour la Grèce » ces fonds que l’UE doit à la Grèce par la redistribution proportionnelle parmi les pays membres de fonds qui sont restés dans les tiroirs mais, en pleine contradiction avec ses prérogatives, il met une conditionnalité politique à son versement. Bref un chantage on ne peut plus cynique où la  Commission se croit dans son droit de retenir une somme due à un pays en état de nécessité et fait dépendre son versement de l’issue de discussions. « Il est assez étonnant de penser que la Grèce, membre jusqu’à nouvel ordre à part entière de l’Union européenne, serait « moins bien servie » dans le cadre de la répartition des fonds européens si elle ne parvenait pas à s’entendre avec les créanciers. La Commission a donc commencé à mettre en place cette « zone euro à deux vitesses »  qu’Alexis Tsipras évoquait ?» écrit Romaric Godin.

Mais il y a plus. Selon des informations provenant des étudiants italiens, la Commission aurait suspendu pour des raisons de procédure le programme Erasmus pour la Grèce ! Si cette exclusion contraire non seulement aux règlements mais à la notion même de l’isonomie, s’avère fondée, elle serait la preuve supplémentaire que ceux qui s’échinent à exiger de la Grèce le respect des règlements, sont disposés à les violer sans hésitation, lorsqu’il s’agit d’exercer un chantage politico-économique à un gouvernement réfractaire.  En d’autres termes, la Commission traite dores et déjà la Grèce comme un non-membre de l’UE, en suspendant les aides auxquelles elle a droit, jusqu’à ce qu’à ce que la Grèce cède sur tous les fronts.

Comme quoi il n’y pas à s’étonner que M. Junker fut le PM du Luxembourg pendant la glorieuse période qui a transformé celui-ci à un paradis fiscal. Il serait intéressant de savoir  en combien de manque à gagner des autres pays européens se traduit cette politique. Combien de manque à gagner de la Grèce qui aujourd’hui manque des fonds suffisants pour couvrir les besoins les élémentaires d’un système de santé en ruines ?  Selon Eva Joly il se peut que le montant s’élève à quelques milliards.

  1. Junker ne manque pas de dénoncer à qui veut l’entendre, le mépris de règles européennes dont ferait preuve Tsipras. Le président de la Commission, si attaché au respect de règles, saurait-il nous dire quelle règle européenne permet à l’Allemagne de dépasser pendant cinq années consécutives le 6% réglementaire d’excédents commerciaux, sans être le moindre du monde inquiéter par aucune instance européenne ? Si j’y fais mention, c’est parce que, comme le dit Ambrose Evans-Pritchard dans le Daily Telegraph, un excédent de l’ordre de 7,9% comme celui qu’affiche actuellement l’Allemagne, a comme effet moins de croissance et plus de chômage pour les autres pays européens. Bref, l’Allemagne n’exporte pas que ses produits, mais a trouvé moyen d’exporter du chômage à ses partenaires européens, sans qu’aucun d’entre eux ne trouve rien à redire.

Enfin, last but not least, jusqu’à quand les économistes de la BCE continueront-ils à cacher sous le tapis l’état pas franchement rassurant de la Deutsche Bank?  La situation délicate de ce géant aux pieds d’argile, embourbé dans une série de scandales et soupçonné de blanchissement d’argent, représente un danger considérable non seulement pour l’Europe mais pour l’économie mondiale. La Deutsche Bank vient d’écoper une amende de 2 milliards pour falsification du Libor, et  est actuellement «aux prises avec quelques 6.000 litiges » juridiques! A la mi-mars ses filiales américaines ont étaient les seules avec celles de Stantander, à ne pas passer les Stress Test de la Fed. Mais le plus inquiétant est que le géant allemand, poursuivi Outre-Atlantique pour évasion fiscale, détiendrait dans son portefeuille une bombe de plusieurs giga-tones.  Rien de moins que quelques trillions de produits à très haut risque, voire toxiques. Sur leur montant exact, les chiffres les plus fous circulent. Il y en a qui parlent de 3 à 4  de trillions, d’autres de  quelques dizaines. Peut-être que le très pointilleux M. Draghi daignerait nous informer de ce qui en est au juste. Car lorsque cette bulle-là éclatera, le krach qui suivra, fera paraître celui du 29 comme une partie de plaisir. C’est bien commode de présenter la Grèce dont la dette ne représente même pas 2% du PIB de la zone euro,  comme le danger qui menacerait l’économie européenne, mais en tant que citoyens européens, nous avons tout de même le droit d’en savoir un peu plus long sur les pratiques plus que douteuses et surtout sur l’état de santé de la DB. Certes le niveau de la TVA sur les spaghettis en Grèce est un sujet d’importance cruciale qui suscite à juste titre un intérêt mondial. Néanmoins, on ne peut pas s’empêcher de penser, qu’il pourrait s’agir là d’une manœuvre de digression bien commode,  destinée à détourner l’attention de ce qui pose vraiment problème.

 

le coup d’état des grands banquiers

Vous êtes-vous déjà demandé d’où vient l’argent ? Si vous avez besoin d’argent, vous allez à une banque qui vous en prête moyennant le fait que vous lui en rendiez plus, normal, pensez-vous pour le service qu’elle vous a rendu. Mais d’où vient l’argent de la banque ?

Au début, les banquiers étaient les gardiens de l’or de leurs déposants et remettaient en échange du papier-monnaie qui avait la même valeur que l’or déposé car reconvertible en or sur demande  tout en étant plus facilement utilisable dans les échanges commerciaux. Rapidement, ils se sont aperçus que tous les déposants ne venaient pas réclamer leur or en même temps et ils ont commencé à prêter une partie de l’or déposé (environ 30%) à d’autres, moyennant des intérêts. C’était déjà une pratique à l’honnêteté douteuse car ils prêtaient de l’argent qui ne leur appartenait pas, et dangereuse car s’il y avait une crise de confiance et que tout le monde venait réclamer son or en même temps, ils faisaient faillite. Actuellement, la monnaie n’est plus adossée à l’or, ce qui n’est pas grave en soi car n’importe quoi peut servir de monnaie à condition d’être infalsifiable et d’avoir une valeur constante : 5% seulement est sous forme de billets, les  95% restants sont sous forme « scripturale », c’est-à-dire simplement écrite dans des ordinateurs. Mais on a permis aux banquiers actuels de faire encore mieux que leurs prédécesseurs : si quelqu’un vient déposer 100€ dans une banque, celle-ci peut prêter 92e avec intérêt à quelqu’un d’autre. Et pas de risque de faire faillite car ces 92€ ne sont pas pris sur l’argent des déposants mais sont créés sur une ligne d’ordinateur puis effacés quand le prêt est remboursé. Autrement dit, une banque vous prête de l’argent qu’elle n’a pas (ou seulement 8% et encore, avec les « titrisations », il n’y a même plus les 8%)). Dans les périodes où elles prêtent beaucoup, tant que les prêts ne sont pas remboursés, on a l’impression trompeuse qu’elles ont créé de l’argent et l’économie peut tourner relativement bien. Mais si, pour une raison quelconque, par exemple parce qu’elles ont fait de mauvaises affaires en bourse, elles cessent de prêter, les prêts se remboursent, l’argent créé s’efface, mais elles empochent les intérêts qui, eux, sont débités de la masse monétaire globale : c’est la récession, la crise. Et donc, au total, les banques n’ont pas créé d’argent pour le système économique mais elles lui en ont pris (les intérêts).

C’est une des raisons pour laquelle la masse monétaire globale s’appauvrit régulièrement. La deuxième raison est due à tous ceux qui ne redépensent pas tout l’argent qu’ils gagnent mais en capitalisent une partie, à petite échelle pour ceux qui mettent un peu d’argent de coté à la caisse d’épargne en cas d’imprévu, à grande échelle pour les banquiers et les riches industriels qui vont jouer en bourse comme on joue au casino.(les sommes jouées en bourse sont 100 fois plus importantes que celles utilisées dans l’économie réelle et ne lui sont d’aucune utilité). Pour que le système économique continue à bien tourner, il faut donc remettre dans le circuit régulièrement de la monnaie nouvelle (également quand une industrie se crée ou quand un travail qui n’était pas monétisé le devient): c’est le rôle de la banque centrale. Si c’est une banque d’état, cela ne coûte pratiquement rien, le prix de fabrication des billets ou, encore moins, de l’écriture scripturale sur un ordinateur. Mais certains banquiers privés ont réussi à obtenir le statut de banque centrale, fabricant la monnaie mais la prêtant à l’état avec intérêt, ce qui est complètement fou car cela veut dire que jamais personne ne crée de nouvel argent et que quand il faut en créer,  l’état s’endette.Ce système a assuré la fortune de ces banquiers mais a plongé ces états dans une dette inextinguible.

Qui sont ces banquiers ?

Le premier qui eut l’idée de prêter aux états, les princes ou rois à l’époque, fut un certain Mayer Amschel Rothschild, à Francfort, dont les 5 fils s’établirent dans les principales villes d’Europe. Celui qui s’installa en Angleterre s’accoquina tellement bien avec le roi Guillaume d’Orange que celui-ci le nomma « Banque d’Angleterre », c’est à dire le seul habilité à émettre de la monnaie. Ce même Nathan Mayer Rothschild,( à qui on doit la formule « donnez moi le contrôle de la monnaie, je me moque de qui fait les lois »), après avoir fait fortune et endetté l’Angleterre, n’eut de cesse de faire interdire par le roi la monnaie locale qui avait été créée dans les colonies d’Amérique et assurait leur prospérité. Il s’ensuivit là bas une période d’austérité qui fut à l’origine de la guerre d’indépendance.

_Dans la Constitution américaine, signée à Philadelphie en 1787,  les « pères fondateurs » avaient bien pris  soin de stipuler clairement, dans l’article 1, section 8, paragraphe 5 : « C’est au Congrès qu’appartiendra le droit de frapper l’argent et d’en régler la valeur. ». Mais les banquiers ne désarmèrent pas et convainquirent le président Washington, dont ils avaient assuré l’élection, de créer une « banque des Etats Unis » privée qui dura 20 ans mais ne fut pas renouvelée. Lincoln leur échappa en créant le « greenback » pour financer la guerre de sécession mais, ayant financé l’élection d’assez de sénateurs et de députés, les banquiers firent voter par le Congrès en 1863 le retrait de la loi des Greenbacks et son remplacement par le National Banking Act (Loi des Banques Nationales, où l’argent serait créé avec intérêt par des compagnies privées). Lincoln fut assassiné au moment où il disait vouloir s’attaquer aux banquiers et une formidable restriction du crédit, organisée par les banquiers, s’ensuivit.

_. Après la panique monétaire de 1907, le peuple américain réclamait que le système monétaire de la nation soit stabilisé. Le président Roosevelt créa la Commission Monétaire Nationale pour étudier le problème mais le sénateur Aldrich qui la présidait dépensa l’argent alloué en voyages d’étude en Europe sans rien produire. Par contre, il réunit dans le plus grand secret 5 représentants des 3 plus grosses banques ( 2 dominées par JP Morgan, la troisième Khun,Loeb & Co représentée par Paul Warburg) à Jekyll Island, une île de Géorgie achetée par des millionnaires et réservée à des millionnaires. En 9 jours, ils mirent au point un projet qui fut présenté ensuite comme celui de la commission et qu’ils réussirent à faire voter en 1913 après avoir dépensé une fortune (5 millions de dollars) pour en faire faire la propagande par les professeurs de leurs universités: ce fût la « loi sur la réserve fédérale » au titre trompeur car ce n’était pas une réserve et c’était un établissement privé et non fédéral. Il avait une apparence collégiale : un conseil des gouverneurs nommés par le président et rendant des comptes au congrès. Mais ce conseil serait contrôlé par un « comité consultatif fédéral » dont les membres seraient choisis par les directeurs des 12 banques partenaires et resteraient inconnus du public et du contrôle parlementaire. Les actions des 12 banques régionales furent rachetées par des banques nationales et ce furent celles contrôlées par Rockefeller, khun-Loeb et Morgan qui en prirent la majorité et contrôlèrent de fait tout le système. Cette loi donnait (et donne encore) à ces 3 banques le pouvoir exorbitant et inconstitutionnel de battre la monnaie à la place de l’état, de fixer les taux d’intérêt, la masse monétaire et le cours de la devise, de faire en sorte  que l’argent soit rare ou abondant,  de  prêter à l’état ensuite à l’intérêt de leur choix, et de rendre ainsi l’état prisonnier d’une dette inextinguible.(Encore aujourd’hui ce sujet est tabou : lire à ce propos le livre d’Eustace Mullins « les secrets de la réserve fédérale »  qui a mis 40ans à réunir les documents prouvant cette conspiration, qui a eu beaucoup de mal à se faire publier et dont la traduction française est parue en 2010 aux ed « le retour aux sources »).

Grâce  à la FED, les crises qui étaient auparavant incontrôlées vont pouvoir l’être au gré  de ces grands banquiers ; c’est le cas de la crise agricole de 1920-1921 : la première guerre mondiale avait provoqué une prospérité générale aux Etats Unis, en particuliers chez les agriculteurs et les ouvriers agricoles qui, méfiants, déposaient leur argent dans des banques provinciales ne faisant pas partie de la FED. Pour casser cela, on encouragea d’abord les agriculteurs à emprunter à grande échelle pour s’équiper et acheter des terres grâce à des taux d’intérêts très attractifs en échange d’hypothèques sur leurs biens, prêts que seules les grandes banques savaient gérer. Puis, lors d’une réunion secrète le 18 mai 1920 du Conseil des Gouverneurs de la FED où seuls les gros banquiers étaient présents, il fut décidé une contraction brutale du crédit (le taux passa de 3% à 7%) et de la monnaie, ce qui eut pour effet de mettre en faillite les agriculteurs et les banques associées, de  réduire le revenu national de 15 milliards de dollars, jetant des millions de personnes au chômage et réduisant de 20 milliards de dollars la valeur des terres et des ranchs.

Sans le système de la réserve fédérale, aucune guerre mondiale n’aurait pu être déclenchée : les pays européens possédaient de grandes armées opérationnelles qu’ils s’épuisaient à financer mais n’avaient pas une économie suffisante pour financer la guerre ; la FED leur prêta 25 milliards de dollars (que les Etats Unis n’avaient pas non plus, qui furent créés et non remboursés) répartis entre tous les futurs belligérants. La guerre faisait marcher l’industrie et rapportait des bénéfices. C’est pour cela aussi que le président Wilson, qui devait sa fortune et son élection aux banquiers, leur donna des postes de commande dans son administration et mis l’Amérique en guerre.

Mais ces hommes les plus puissants des Etats Unis rendaient eux-mêmes compte à une autre puissance qui les contrôlait de fait déjà en 1910 : la puissance financière Anglaise concentrée dans la branche londonienne de la maison Rothschild. Bien que ces firmes fussent américaines en apparence, entretenant simplement des agences à Londres, le fait est qu’elles allaient prendre leurs ordres à Londres car leur origine se trouve dans le trafic international de l’or, des esclaves, des diamants et autres produits de contrebande où la grande Bretagne, grâce à sa maitrise des mers, avait le monopole. Pouvant disposer de sommes énormes, créées sur ses ordres par le board de la FED aux états Unis, Londres est le centre financier de la planète (on comprend  mieux l’indéfectible alliance entre l’Angleterre et les états unis) : 5 banques d’affaire de Londres contrôlent en réalité les banques new-yorkaises qui possèdent la majorité de contrôle dans la banque de réserve fédérale de New-York.

Le krach de 1929 fut programmé par Londres et la FED pour mettre fin à une période de spéculation, en augmentant brutalement les taux d’intérêt, après avoir prévenu au préalable les initiés ; les autres, les petits spéculateurs, perdirent tout ; 11630 petites banques firent faillite, augmentant encore la concentration de l’argent dans les grandes banques. La FED laissa pourrir la situation jusqu’en 1933 pour soutenir l’élection de Roosevelt, lui-même banquier : elle créa alors 100 millions de dollars d’argent frais et les usines recommencèrent à embaucher. Roosevelt tenta bien de discipliner les banques en créant une séparation entre les banques de dépôt et les banques d’investissement (largement contournée puis abrogée en 1970 par Clinton) mais la loi bancaire de 1935 étendit la durée des mandats des gouverneurs de la FED à 14 ans, 3 fois et demi la durée d’un mandat présidentiel, ce qui signifiait que quelque soit le nouveau président, il ne pourrait rien changer à la politique de la FED .En 35 ans,  les banques de la FED ont accru leurs actifs de 143 millions à 45 milliards de dollars sans rien produire, simplement par la création monétaire dont 95% sous forme de crédit

C’est à cause de cette période de chômage de masse et de misère que put naître le nazisme. Les juifs, dont beaucoup étaient banquiers, ont servi de boucs émissaires et ont été victimes de la haine engendrée par la violence du capitalisme. Hitler fut inspiré par les écrits d’Henri Ford, porté au pouvoir par les grands industriels allemands et c’est une banque anglo-américaine (Schroeder-Rockefeller) qui lui a fourni l’argent nécessaire pour  se réarmer.

La mondialisation s’est faite sur le modèle de la FED, remplaçant les banques centrales des états par des banques privées. « L’Europe » a été construite sur le même modèle : sa banque centrale hors contrôle démocratique ne fournit pas les états mais des banques privées qui prêtent ensuite aux états avec intérêts, ce qui augmente leurs dettes de façon inextinguible  et permet aux banques d’imposer leur politique.

La « crise » que nous vivons n’est pas une crise mais l’aboutissement d’un processus qui livre les états au pouvoir destructeur des banques. Quand elles ont pris tout l’argent qu’elles pouvaient prendre, elles n’ont que 2 moyens pour continuer à s’enrichir: la « croissance » qui leur permet de prêter à nouveau, ou un écroulement général, un krack ou une guerre, car , après, il faudra reconstruire.

La croissance infinie dans un monde fini étant impossible, vers quoi allons nous si nous ne changeons pas de système? L’austérité imposée par les banques pour rembourser une dette illégitime, le dumping social, l’impossibilité d’être dans une extension permanente nous conduisent de nouveau à une période de chômage et de misère dont il risque de sortir, les mêmes causes produisant les mêmes effets, une grande violence.

En sortir serait simple si l’état le voulait : reprendre le contrôle de la création monétaire, ne pas rembourser la partie illégitime de la dette.(Annuler une dette ne coûte strictement rien à une banque centrale et le refus d’annuler la dette de la Grèce alors qu’une grande partie de la dette Allemande avait été annulée après la guerre est un choix politique et non économique)

le capitalisme est par nature antidémocratique

On a coutume de définir le capitalisme par la notion de propriété individuelle et propriété de ses instruments de travail en l’opposant au « communisme » où tout est collectif, comme s’il n’y avait que ces 2 alternatives. Tout ceci est très manichéen car, d’une part le communisme est associé à la dictature stalinienne qui n’avait plus aucun rapport avec l’idéal communiste originel et d’autre part le capitalisme n’est pas que ça : c’est un système économique, certes, mais associé à une idéologie et une certaine organisation sociale.

_une idéologie disant qu’il n’y a pas de bonne place pour tout le monde et que seuls quelques-uns arriveront aux très bonnes. Cela met les citoyens en situation de compétition les uns par rapport aux autres d’autant plus violente que les mauvaises places sont vraiment très mauvaises et que les chances d’arriver aux très bonnes ne sont pas égales. Cela crée un climat social de violence et d’exclusion : imaginez l’ambiance qui règnerait dans une famille si les parents disaient aux enfants que les premiers arrivés pourraient tout manger et que les derniers n’auraient rien. Cette idéologie s’oppose à l’idéologie démocratique qui cherche à donner des droits égaux à tous, à protéger les plus faibles des plus forts.

_Un système politico-économique qui donne du pouvoir à ceux qui possèdent sur ceux qui ne possèdent pas : ceux qui possèdent une entreprise, même s’ils n’y travaillent pas, ont le pouvoir d’engager ou de licencier qui ils veulent, décident du salaire des employés et de la répartition des bénéfices.Ceux qui possèdent de l’argent ont du pouvoir sur ceux à qui ils prêtent ou qu’ils font travailler pour eux. Ceux qui ont beaucoup d’argent arrivent à gangréner le pouvoir politique.

_un système économique qui tend à concentrer l’argent et le pouvoir qu’il donne sur un très petit nombre de personnes : la compétition à outrance oblige les entreprises à se concentrer pour être plus fortes  et les propriétaires des très grosses entreprises peuvent alors détourner à leur profit de très fortes sommes ; de plus, le système permet à ceux qui ont trop d’argent, plus d’argent qu’il n’en est nécessaire pour vivre, d’en gagner encore plus sans rien produire en le prêtant, en spéculant ou en le jouant à la bourse.L’argent qui se capitalise est très peu redistribué, ce qui diminue la masse monétaire nécessaire à la vie économique et oblige à une création permanente de monnaie, ce qui fait  la fortune des banques et la dette exponentielle des états (voir l’article sur le coup d’état des grandes banques).

La société est donc traversée par 2 courants antagonistes : le courant capitaliste de la compétition sauvage et individualiste pour la possession et l’argent. Et le courant démocratique, plus élaboré, qui cherche des relations plus égalitaires d’échange et de solidarité. Mais qui a besoin de s’appuyer pour cela sur  un ensemble de lois protégeant les plus faibles des plus forts et sur un état à la fois fort et représentant l’intérêt général pour les faire appliquer.

Le capitalisme existe depuis longtemps car il correspond  aux pulsions primaires des animaux et des êtres humains, à savoir la loi dite « de la jungle », c’est-à-dire la loi du plus fort qui permet à ceux-ci de faire ce qu’ils veulent des plus faibles, les éliminer ou les soumettre  à travailler pour eux. Il a été contrebalancé par d’autres pouvoirs : pouvoir de la religion, pouvoir de l’aristocratie, pouvoir du roi, pouvoir d’institutions élues démocratiquement. Il peut aussi être plus ou moins violent suivant la plus ou moins grande  rapacité de ceux qui dominent. Le problème est qu’aux USA, le capitalisme s’est développé de manière particulièrement sauvage (voir l’article sur les USA). Il a gangréné dès le début l’état démocratique et n’a plus rencontré d’autres contre-pouvoirs . Il profite essentiellement aux grands industriels et aux banques (voir l’article sur le coup d’état des grandes banques). Il s’est mondialisé grâce aux guerres menées par les USA, guerres militaires ouvertes, guerres par services secrets , guerres économiques et guerre idéologique : l’idéologie « néo-libérale » demande à tous les états qui s’y soumettent d’ouvrir leurs frontières pour être pillés par la concurrence faussée des multinationales, de saborder toute leur partie sociale pour la donner au privé (donc aux capitalistes) et de ne garder que la partie répressive de l’état pour mâter le mécontentement des populations. La construction européenne a été faite dans cet esprit.

Les laisser faire, c’est laisser le monde courir à sa perte. Pourtant il est possible de concevoir un système économique démocratique qui ne soit ni capitaliste ni communiste, en conservant la propriété privée mais en mettant des limites à l’enrichissement.( voir l’article « programme pour un monde meilleur »)